Dans la mentalité collective
actuelle, la rage est un fléau oublié. On peine à mesurer l'impact
que cette terrible maladie, inguérissable jusqu'à la fin du XIXe siècle,
avait jadis sur les populations rurales. Depuis le Moyen Âge, la peur
de la rage était associée dans l'esprit de nos aïeux à celle du loup
qui en était le principal agent de contamination. L'incursion soudaine
dans les campagnes et les villages d'un loup enragé, mordant
furieusement humains et animaux, répandait l'épouvante. Ainsi,
selon un chroniqueur du XVIIe siècle, à Sewen, à l'automne 1672,
"un loup mord de nombreuses personnes, chacune est prise d'un fou
rire puis meurt après la morsure." Après l'élimination
des loups, ce sont les renards et les chiens qui ont continué leur œuvre de mort en propageant les infections fatales.
Gravure
sur bois du Moyen Âge représentant des paysans aux prises avec
un chien enragé. (auteur inconnu)
[Origine
de l'image : Wikipedia] |
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Il y a moins de 150 ans, la rage semait encore l'effroi dans notre vallée.
Le présent article relate deux cas de rages locaux, l'un en 1884,
l'autre en 1887 ; entre les deux récits, une présentation des
avancées de Pasteur de l'année 1885.
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Rappel
: au moment où se passent les évènements relatés ci-dessous,
l'Alsace fait partie de l'Empire Allemand. La frontière entre la
France et l'Allemagne passe à 2 km à l'ouest de Soppe-le-Haut et à 5 km
à
l'ouest de Soppe-le-Bas (actuelle limite entre le Haut-Rhin et
le Territoire de Belfort).
Dans
cet article, les localités sont indiquées par leurs noms
actuels et non par leurs dénominations allemandes de l'époque.
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I. En 1884 : La rage frappe à
Soppe-le-Bas.
Au
début du mois de juillet 1884, un chien enragé fait irruption à
Soppe-le-Bas. Avant d'être abattu, la bête a le temps de mordre trois
chiens, deux chats, une oie et une poule et, malheureusement, également
une jeune fille de 20 ans : Marie-Louise, la fille du maréchal-ferrant Jean-Baptiste
Goepfert. La police donne l'ordre de tuer immédiatement tous les
animaux mordus et instaure trois mois d'interdiction de laisser divaguer
les chiens.
Quant à Marie-Louise,
plutôt que de faire appel à un médecin, elle s'adresse à un
guérisseur pratiquant le rituel de saint Hubert. Cette superstition
ancestrale, à cette époque encore bien ancrée dans les campagnes,
fait confiance aux pouvoirs surnaturels du saint patron des chasseurs
pour être préservé de la rage.
Le procédé utilisé par le soi-disant thaumaturge [appelé
Hubertusmann dans l'aire germanique]
allie traitement physique et prescriptions spirituelles. Le praticien
cautérise la plaie en appliquant sur la morsure suspecte la "clé
de saint Hubert" chauffée au rouge. [en
réalité la clé de saint-Hubert n'est pas une clé, mais un instrument
en
fer] Pour
renforcer le traitement, les patients ne doivent ni se laver ni dormir dans un
lit, uniquement sur de la paille. Avec leur famille, ils doivent jeûner
et faire un neuvaine en l'honneur de saint Hubert.
Pour
Marie-Louise, l'intercession de saint Hubert semble couronnée de
succès car pendant les
semaines suivantes, la jeune fille se porte si bien qu'elle ne pense
plus guère à sa mésaventure.
Le mardi 9 septembre, Marie-Louise a encore travaillé à la lessive
pendant toute la journée. Mais le lendemain, mercredi 10 septembre,
elle montre les premières atteintes d'une maladie. Elle se plaint d'une
constriction de la gorge, de la difficulté d'avaler et de frissons. De
temps en temps, sa respiration devient saccadée. Elle éprouve une extrême
aversion pour l'eau et les autres liquides et ne supporte plus la
lumière ; la présence d'autres personnes lui répugne. Ce sont bien les symptômes
de la rage après une incubation de onze semaines.
Dans la nuit du mercredi au jeudi 11 septembre, Marie-Louise est prise
de convulsions par crises, espacées de moments de rémission. La jeune
fille demande les derniers sacrements qu'elle reçoit en pleine
conscience, mais entre plusieurs accès convulsifs.
Dans la matinée du jeudi 11 septembre, les convulsions augmentent en
nombre, deux hommes ont de la peine à retenir la malade qui, toutefois,
n'essaie pas de mordre. Dans l'intervalle des accès de convulsions,
elle a le courage de s'occuper des dispositions de son enterrement.
Appelé à la hâte, le médecin
cantonal, lui met une camisole de force. La malheureuse, les bras
emprisonnés dans ce vêtement de contention, continue de se rouler sur
son lit, et à chaque instant, on est obligé d'enlever la bave et l'écume
qui sortent de sa bouche.
Le médecin conseille alors aux parents de conduire Marie-Louise à l'hôpital
de Masevaux. Au moment de partir, elle fait des adieux déchirants aux
personnes de son entourage. Puis on la hisse sur une voiture et on l'emmène
à Masevaux. A l'arrivée dans ce bourg, le maire de Masevaux refuse de
recevoir la malade dans l'hospice de la ville, prétendant qu'il ne peut
prendre cette responsabilité sur lui. Force est de revenir à
Soppe-le-Bas.
Sur les supplications instantes de la jeune fille, la camisole de force
lui est enlevée, ce qui la calme pendant huit à neuf heures. Mais sa
raison, déjà bien affaiblie dans la matinée, l'abandonne. Elle se
lamente et invective ceux qui l'ont conduite en voiture à Masevaux,
leur reprochant de l'avoir donnée en spectacle.
Dans la soirée du jeudi 11 septembre, un vétérinaire vient voir la
malade et conseille un remède qui, dit-il, a guéri un de ses anciens
condisciples atteint d'hydrophobie. Il consiste à prélever de l'écume
qui sort de la bouche de la jeune fille, de la chauffer à 42 degrés
puis de l'appliquer sur une égratignure faite sur la peau de la
patiente.
Mais comme on voit que la malade est proche de sa fin, on juge inutile
d'essayer cette opération.
Vers 11 heures du soir, les convulsions recommencent, terribles. Le
vendredi 12 septembre vers deux heures du matin, la malade s'affaisse et
vers six heures elle rend son dernier souffle. En moins de trois jours
de souffrances, la rage a emporté cette jeune fille dans la fleur de l'âge.
Extrait
de l'acte de décès de Marie Louise Goepfert et traduction
simplifiée. |
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Soppe-le-Bas,
le 12 septembre 1884.
Devant
l'officier de l'état civil soussigné, s'est présenté
aujourd'hui
le
maréchal-ferrant Goepfert Jean Baptiste,
habitant
à Soppe-le-Bas,
et a
déclaré que Goepfert Marie Louise,
âgée
de 20 ans, de religion catholique,
habitant
à Soppe-le-Bas,
née à
Soppe-le-Bas, célibataire,
fille
du déclarant et de son épouse, Marie Anne née Guttig, demeurant
à Soppe-le-Bas,
est
décédée à Soppe-le-Bas
le 12
septembre de l'année mille huit cent quatre-vingt quatre
à six heures du matin.
Origine
du document : Archives d'Alsace.]
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II. En 1885 : Pasteur procède aux premières vaccinations contre la
rage.
A un an près,
le destin de Marie-Louise Goepfert aurait pu être changé !
Depuis 1880, dans son laboratoire de l'École Normale Supérieure, rue
d'Ulm à Paris, Louis Pasteur (1822-1895)
cherche à appliquer à la rage la méthode d'atténuation des microbes
qui lui a permis de mettre au point des vaccins contre des maladies
animales comme le choléra des poules ou le charbon des moutons. En
1884, il réussit à protéger des chiens contre la rage grâce à
l'injection de moelles vieillies de lapins rabiques. L'Académie des
sciences juge cette avancée concluante, mais Pasteur redoute de passer
à des essais sur l'homme.
Louis
Pasteur en 1878. (photo de Nadar)
Pionnier
de la microbiologie, mais aussi chimiste, naturaliste, biologiste,
agronome, Louis Pasteur est le plus éminent scientifique français
du XIXe siècle. Bien que n'étant pas médecin lui-même, il a
consacré une grande partie de sa vie à la médecine et au combat
contre les maladies infectieuses, assisté par des
collaborateurs talentueux comme Émile Roux, Albert Calmette,
Alexandre Yersin ou Élie Metchnikoff. Du
formidable succès du vaccin contre la rage est né en 1888 l'Institut
Pasteur, dédié aux recherches contre la
rage et les autres maladies.
Origine
de l'image : Wikipedia |
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Louis
Pasteur surmonte son hésitation lorsque, le 6 juillet 1885, on lui amène
Joseph Meister, un garçon de 9 ans venu de Steige, près de Villé (Bas-Rhin). L'enfant
a été mordu 14 fois par un chien enragé et les médecins ne doutent
pas qu'il contractera la rage. Pasteur confie au Dr Grancher le soin
d'inoculer le traitement à l'enfant. En dix jours, Joseph Meister
reçoit treize injections de moelles rabiques de moins en moins
atténuées. La rage ne se déclare pas, l'enfant est sauvé !
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Joseph
Meister en 1885.
Joseph
Meister (1876-1940) est né à Paris de parents alsaciens,
mais il passe son enfance à Steige où son père est
boulanger. Après avoir été préservé de la rage par Pasteur,
il retourne en Alsace alors allemande. A 20 ans, il fait son
service militaire dans l'armée allemande. Libéré, il
travaille comme boulanger à Villé. En 1912, il obtient un
emploi de gardien des laboratoires parisiens de l'Institut Pasteur. Il
échappe ainsi à l'enrôlement dans l'armée allemande lors de
la Première Guerre mondiale.
En
juin 1940, très affecté par la défaite française et
désespéré par l'annonce erronée de la mort de sa femme et de
ses deux filles sous un bombardement ennemi, il se donne la mort
chez lui à l'aide de son fourneau à gaz.
Origine
de l'image : Wikipedia |
Ce
premier succès de Pasteur est renouvelé trois mois plus tard avec Jean-Baptiste
Jupille. Le 14 octobre 1885, en compagnie de cinq autres
enfants, ce garçon de 14 ans garde des moutons à Villers-Farlay
(village du Jura à 10 km d'Arbois), quand un chien errant enragé
l'attaque. Pour couvrir la fuite de ses camarades, Jean-Baptiste
affronte la bête, armé de son seul fouet. Malgré plusieurs morsures
profondes à la main gauche, il parvient à terrasser le chien. Il le
musèle avec la lanière du fouet, l'assomme à coups de sabot puis le
noie dans un ruisseau proche.
Aussitôt, le maire de
Villers-Farlay écrit à Louis Pasteur qu'il connaît pour l'avoir
rencontré à Arbois, la ville où le savant a passé son enfance et où
il possède une maison. Pasteur répond qu'il accepte de soigner
Jean-Baptiste et qu'il le logera dans une chambre annexe de son
laboratoire pendant la durée des soins. Une collecte à Villers-Farlay
réunit la somme nécessaire pour payer le billet de train pour Paris où
le garçon arrive le 20 octobre. Après une dizaine de jours de
traitement, Jean-Baptiste Jupille est hors de danger et, début
novembre, il peut regagner le Jura.
La vaccination réussie de Joseph Meister n'avait pas été annoncée au
grand public ; en revanche, son second succès détermine Pasteur à
faire connaître que la rage était enfin vaincue ! La nouvelle de la guérison
de Jean-Baptiste Jupille se répand dans le monde entier. L'information
est d'autant plus retentissante que Pasteur fait du jeune berger un héros
national dont la France entière admire le courage. Grâce à
l'intervention du savant, l'Académie Française décerne à
Jean-Baptiste Jupille le Prix Montyon, doté d'une gratification de 1000
Francs, qui récompense un Français pauvre auteur d'une action héroïque.
Jean-Baptiste
Jupille luttant avec le chien enragé. Bronze
du sculpteur Émile Louis Truffot (1843-1896).
La
renommée de Jean-Baptiste Jupille après son traitement réussi
contre la rage et la divulgation de sa conduite héroïque est
immense. Il est statufié de son vivant. A partir de 1888, il
travaille comme garçon de courses et de laboratoire à l'Institut
Pasteur, puis comme concierge et enfin gardien-chef. Il
décède à Joinville-le-Pont en 1923 à l'âge de 53 ans. Origine
de l'image : catalogue du site
https://www.aguttes.com/ |
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A partir de là, depuis la France et l'étranger, c'est la ruée de
personnes mordues par des animaux enragés qui cherchent leur salut dans
le laboratoire de la rue d'Ulm. Entre la fin octobre 1885 et le 31 décembre
1886, soit 14 mois, 2682 personnes mordues sont traitées. Sur ce
nombre, 31 meurent, soit une mortalité de 1,15 %, inférieure à la
mortalité due à toutes les maladies sérieuses à cette époque.
"La
vaccine de la rage", par Laurent-Gsell (1860-1944).
En
1887, Laurent Lucien Gsell, dit Laurent-Gsell, un neveu de Louis
Pasteur, présente ce tableau au salon de la Société des
Artistes Français. L'artiste sacralise la science : autour de la
mère et de l'enfant, les hommes de sciences et les patients
étrangers remplacent les rois mages et les bergers des scènes
religieuses traditionnelles.
L'homme
assis prêt à inoculer le vaccin est le docteur Jacques Grancher.
Louis Pasteur se tient debout, une feuille à la main. Au second
plan, des collaborateurs du savant. A gauche, des étrangers venus
d'Afrique du Nord et de Russie symbolisent la portée universelle
de la découverte de Pasteur.
Image
et renseignements tirés du site : https://www.cnap.fr/
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III. En 1887 : Un chien enragé mord 11 personnes dans la basse-vallée.
Le
dimanche 30 janvier 1887, vers 14 heures, les fidèles de Soppe-le-Haut
se dirigent paisiblement vers l'église du village pour assister aux vêpres.
Soudain surgit un puissant chien noir présentant tous les symptômes de
la rage.
[on saura
plus tard que le chien venait de Melisey (Haute-Saône). Il avait donc
franchi la frontière franco-allemande et parcouru 40 km jusqu'à
Soppe-le-Haut.]
En l'espace d'un
instant, le molosse enragé mord quatre personnes dont une petite fille
qui a la figure toute déchirée, avant de poursuivre sa course vers
Soppe-le-Bas. Dans ce village, il mord également cinq passants
impuissants face à cette attaque fulgurante. Un quart d'heure plus
tard, la bête furieuse arrive au Pont-d'Aspach où elle mord plusieurs
chiens et renverse une personne qui n'est heureusement pas blessée.
Elle passe ensuite à Aspach-le-Bas. Là, elle mord un petit garçon à
la main puis continue sa course folle en direction de Cernay où un
laitier et plusieurs chiens sont également victimes de ses morsures.
Après que le chien a
passé au Pont d'Aspach, un industriel textile du lieu et chasseur émérite,
René Stehelin, fait atteler sa voiture, prend son fusil et
se met à la poursuite de l'animal. En route, il rencontre Jules
Bubendorf (1858-1914), le vétérinaire de Thann, qui se joint à lui et
c'est à deux qu'ils continuent la chasse facilitée par les traces
laissées dans la mince couche de neige qui recouvre le paysage.
Le hasard les sert : sur l'Ochsenfeld, près de la Croisière de Cernay,
ils voient le chien noir revenir vers eux et accélérer sa course comme
pour se jeter à la tête du cheval. Au moment où l'animal écumant
prend son élan, Stehelin, tirant par-dessus son attelage, le frappe
d'une balle qui l'étend raide mort dans la neige.
Le cadavre du chien est
aussitôt transporté dans l'auberge proche où le vétérinaire en fait
l'autopsie. Celle-ci ne laisse aucun doute : la bête était atteinte de
la rage à un haut degré d'intensité.
Dans les villages traversés par la bête enragée, l'émotion est
indescriptible. La terreur est grande à Soppe-le-Bas et dans les
villages environnants où le souvenir de la mort de Marie-Louise
Goepfert est dans toutes les mémoires.
Seule consolation, à la différence de septembre 1885, il y a
maintenant un espoir, celui porté par les échos des miracles de
Pasteur qui sont arrivés jusque dans les plus petits villages. En quelques mois,
la toute jeune confiance dans la science a remplacé l'antique croyance
magique en saint Hubert.
Neuf enfants de quatre à huit ans et trois adultes, un homme et deux
femmes, ont été les victimes du chien enragé : des gens modestes aux
maigres moyens financiers, sans expérience d'un long voyage à l'étranger
et aucunement avertis sur la façon de contacter l'Institut Pasteur dont
en outre ils ne parlent pas la langue. Il semble impossible que par
eux-mêmes ils puissent accéder aux soins salvateurs à 400 km de leurs
foyers.
Heureusement, dès le lundi
matin, leur destin est pris en main par une notabilité de Sentheim, René Bian. Fils de Louis Bian (1812-1890), le fondateur de l'industrie
textile à Sentheim, René Bian partage sa vie entre Sentheim et Paris où
il s'est marié en 1872. Autant à l'aise en allemand qu'en français,
il prend en charge ses malheureux compatriotes.
Il se met d'abord en rapport
avec le Kreisdirektor [chef
de l'administration de l'arrondissement] de
Thann. Celui-ci fait venir de Colmar un Medizinalrath [conseiller
médical] qui, après
avoir examiné le cadavre du chien, confirme les conclusions du vétérinaire
Bubendorf.
Il est immédiatement décidé
que les personnes mordues vont être envoyées à Paris grâce à une
subvention de l'État allemand de 500 Marks pour y suivre le traitement de Pasteur.
Aussitôt, René Bian télégraphie à l'Institut Pasteur qui répond
sans attendre qu'il est prêt à recevoir les onze Alsaciens.
René Bian organise le voyage. Il en avance les frais en attendant l'allocation
de l'État et s'engage, avec l'un de ses amis, de prendre en
charge la différence si nécessaire. Le mercredi 2 février, la petite
caravane des victimes part de Sentheim par le train de 16 heures pour
Mulhouse où elle prend le train de 18 heures 20 à destination de
Paris. Lors de l'arrivée à Paris le lendemain matin, un ami de René
Bian réceptionne les Alsaciens à la gare et les conduit au laboratoire
de la rue d'Ulm pour y suivre un traitement de douze jours.
Les soins ont dû être
plus longs et compliqués que prévu car ce n'est que le 24 février
1887 et les jours suivants que plusieurs journaux français (Le Petit
Troyen, La Petite Bourgogne, Le Réveil, Le Nouvelliste de Bellac, Le
mot d'Ordre...) font paraître l'information que les Alsaciens soumis à
la vaccination antirabique à l'Institut Pasteur étaient tous repartis
guéris dans leur pays natal : fin heureuse d'évènements dramatiques !
Pour l'opinion française si nationaliste de l'époque, c'est une
grande fierté que les Alsaciens soient venus chercher leur salut dans
leur patrie perdue en 1871. Les éditorialistes reconnaissent cependant
que les autorités allemandes ont pris dans cette circonstance les
mesures appropriées avec efficacité et sans esprit de déloyauté.
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A
gauche, Charles René Stehelin (1834-1893), industriel au
Pont-d'Aspach, qui a tué le chien enragé près de Cernay.
Origine
de l'image : Geneanet, arbre de Daniel Muller.
A
droite, René Bian (1844-1917), industriel à Sentheim, maire de
Sentheim de 1888 à 1915, qui a organisé et financé le
déplacement à Paris des 11 victimes du chien enragé pour leur
traitement à l'Institut Pasteur.
Origine
de l'image : Wikipedia.de
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Conclusion.
Les deux cas de rage
dans nos villages en 1884 et 1887, aux dénouements si différents,
illustrent l'extraordinaire portée de l'œuvre de Pasteur.
"M. Pasteur a vaincu la mort !" s'exclame l'écrivain Henri de
Panville dès octobre 1885. On comprend pourquoi le savant a été célébré
de son vivant comme un héros de la science, un saint laïque
! et que depuis un siècle et demi, Louis Pasteur est dans tous les
esprits l'un des grands bienfaiteurs du genre humain.
Aujourd'hui cependant, tant d'années après son invention, toute
l'humanité ne bénéficie pas du vaccin antirabique : en Asie et en
Afrique, la rage tue chaque année 59 000 personnes ; et n'oublions pas
que, même dans les pays les plus développés, une fois les symptômes
apparus, la rage est toujours mortelle.
Carte
du monde indiquant la présence de rage humaine transmise par
les chiens :
cliquer ici.
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Henri
Ehret, décembre 2023.
Contacter
l'auteur.
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Mise
à jour, janvier 2024 :
En
savoir plus sur la rage dans nos villages : voir dans
"Patrimoine Doller" n°12 de 2002, l'article "Un
fléau d'autrefois, la rage" par Jean-Marie Ehret.
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Sources :
Cas de rage de 1884 :
- journal
"L'Express" du
18 septembre 1884
- journal
"Colmarer
neueste Nachrichten" du 7 avril 1924
- état civil du
Haut-Rhin
Sur la rage en général
et les premières vaccinations par Pasteur :
- Wikipédia
-
L'Internaute
-
"Journal des villes et des campagnes"
du 20 février 1887
- site "Racines
Comtoises"
- site "Jura Musées"
- site :
https://sante.gouv.fr/
- site :
https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/rage
- site :
https://www.cnap.fr/pasteur-saint-la%C3%AFc-de-la-science-moderne
Cas de rage de 1887 :
-
journal "L'Express" du 2 et du 3
février 1887
-
journal "Le Figaro" du 2 et du 6
février 1887
-
"Journal de Roanne" du
10 février 1887
- identification Bian, Stehelin et Bubendorf :
Geneanet.
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