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Le 3 avril 1808, "La Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel" informe ses lecteurs d'un grave accident de montagne survenu entre Saint-Maurice-sur-Moselle et Sewen et relate les opérations de sauvetage entreprises. L'article n'est pas signé. Dans le tableau ci-dessous, la colonne de gauche reproduit l'article du journal, tandis que celle de droite apporte un complément d'informations aux noms et termes en vert dans le texte.
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Sewen (Haut-Rhin), le 24 mars. Le
9 février, un fossoyeur de métaux étant décédé
dans cette commune, un garçon d'ici a été expédié pour
aller inviter à l'enterrement un de ses camarades qui travaille dans
une mine de l'autre côté des montagnes, à Saint-Maurice, département
des Vosges. Ils
revenaient l'un et l'autre sur le soir par une des plus hautes
montagnes. Ils perdent chemin ; la neige de huit à dix pieds de
hauteur les avait égarés. Ils arrivent sur un
rocher, et tout-à-coup tombent presque perpendiculairement à plus de
150 pieds en bas. Le fossoyeur roule dans un précipice
couvert de glace, se casse une cuisse ; son corps tout entier écorché
et ensanglanté est arrêté par un buisson qui le préserve d'une
seconde chute dans un précipice plus profond ; mais il se trouve étendu
sur une place étroite et inaccessible à cause des masses de glaces qui
entourent tout cet endroit. Le garçon qui l'accompagnait avait fait une chute moins dangereuse ; il avait roulé dans la neige et, quoique écorché par le passage des épinaies et ayant une jambe assez fortement blessée, il s'est trouvé en état de poursuivre son chemin mais non de secourir son camarade dont les soupirs indiquaient qu'il vivait encore. Boitant,
il descend un chemin d'une
lieue et demie,
arrive à Sewen, et annonce le malheur qui vient d'arriver. Le
maire engage
dix garçons robustes et hardis à faire sur-le-champ la recherche du
malheureux fossoyeur. Ils partent dans la nuit à la lueur des torches
de buis résineux, munis de houes et de haches. Ils emmènent avec eux
le garçon blessé qui doit indiquer l'endroit où est tombé son
compagnon. Ils
arrivent, ayant fait deux
lieues (6,5
km) dans l'espace d'une heure à travers une montée escarpée et
couverte de neige. Sur leur appel souvent réitéré, le fossoyeur donne
enfin quelques signes de vie ; mais ils désespèrent de pouvoir
parvenir jusqu'à lui. Ils ne rencontrent que des glaces sous leurs pas.
Ils se déterminent à tailler une espèce d'escalier sur la pente
rapide du rocher. Après
un travail ardent de deux heures, ils sont près du malheureux mais ils
ne peuvent l'atteindre et le saisir. Ils se désespèrent, croyant ne
pouvoir le sauver. Enfin ils délibèrent, ils cherchent quel moyen ils
pourront
employer. Ils nouent leurs mouchoirs, les jettent au fossoyeur qui a la
force d'en attacher un bout au buisson et de se laisser glisser sur une
roche inférieure. Après d'incroyables efforts et à travers de grands
dangers, les jeunes gens arrivent sur ce rocher ; ils ôtent leurs
habits, les étendent sur la glace et traînent ainsi le fossoyeur
jusqu'à un sentier où ils peuvent le charger sur leurs épaules ; ils
le portent dans une chaumière, près du village d'Oberbruck. ll
était demi-mort, évanoui et gelé de froid. On s'empresse pour le
secourir. L'un des habitants de Sewen part sur-le-champ pour Massevaux.
Il amène un chirurgien qui remet la cuisse cassée, panse les autres
plaies et rappelle à la vie ce malheureux. ll est natif de Styrie. On
ne peut trop louer le courage et le dévouement de nos jeunes
concitoyens : deux d'entre eux ont surtout été exposés au plus grand
danger. Ils ont roulé sur les glaces du rocher à plus de deux cents
pas vers l'abîme. L'un n'a été sauvé qu'en étant arrêté dans sa
chute par un arbre, et l'autre qu'en s'accrochant aux habits du premier.
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fossoyeur de métaux : mineur. Le mineur décédé à Sewen : Xavier Wassmer, âgé de 38 ans, originaire de Sankt-Trudpert dans le Münstertal en Forêt-Noire (Allemagne), époux de Maria-Anna Riester (ou Riesterer). Il est mort le 7 février 1808 à 9 heures du soir dans la maison du cultivateur Henry Iltis qui a déclaré le décès en compagnie du curé de Sewen, Jean-Thiébaut Deyber. (ce dernier est connu pour avoir vacciné 200 enfants de Sewen contre la variole.) huit à dix pieds : de 2,50 m à 3,20 m. plus de 150 pieds : environ 50 m.
épinaies : lieux où poussent des arbustes épineux.
une lieue et demie : environ 5 km.
le maire : il s'agit de Conrad Iltis, maire de Sewen de 1807 à 1813.
deux lieues : 6,5 km.
Oberbruck : l'indication de ce village laisse supposer que l'accident du mineur a eu lieu aux environs du col des Charbonniers. En évacuant le blessé vers Oberbruck, plutôt que vers Sewen, les sauveteurs bénéficiaient par le Gresson d'un chemin moins escarpé et se rapprochaient du chirurgien de Masevaux. Styrie : région d'Autriche, autour de Graz. |
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Localisation possible des évènements sur une carte actuelle. (Carte IGN/Club Vosgien au 1:50 000) |
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En guise de conclusion : Le sauvetage du mineur accidenté est un bel exemple d'abnégation et de solidarité de la part des jeunes gens de Sewen. Malgré la pauvreté de leurs moyens matériels, ils ont, grâce à leur courage et leur ténacité, arraché leur prochain à la mort.
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Henri Ehret, novembre 2020. |
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Sources. - "La Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel" du 3 avril 1808. - Le site des archives du Haut-Rhin pour les actes d'état-civil de Sewen. - L'identité et l'origine du mineur décédé à Sewen et de son épouse ont été établies grâce aux recherches de M. Bernard Gebel. |
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