RACINES FRANC-COMTOISES.

Biographie de Paul Bassenne et Aline Bouhelier.

Tableau généalogique des ancêtres franc-comtois

Nota :  Sauf indication particulière, les illustrations sont des photos de famille, des cartes postales et des photos de l'auteur. Lorsque tous les prénoms d'une personne sont indiqués, le prénom usuel est souligné. Jadis, en Franche-Comté, l'usage voulait que l'on emploie le dernier prénom de l'état-civil comme prénom courant.

 

Paul Bassenne.

 

Paul Bassenne, le père de mon épouse, est né en 1892 à Chaux-lès-Clerval (Doubs). Ses parents, Pierre-Constant Bassenne et Marie Bergerot, ont eu neuf enfants dont cinq ont atteint l'âge adulte.

La lignée paternelle de Paul est issue de Jean-Claude Bassenne, marchand de bois, qui s'est installé à Chaux-lès-Clerval au début du XVIIIe siècle avec son épouse, née Louise Martelot. 

Un de leurs fils, Alexis Bassenne, né vers 1741, accéda au rang de notable. Laboureur aisé, il fut élu échevin de sa communauté en 1773, puis devint député de Chaux-lès-Clerval aux assemblées du bailliage de Baume-les-Dames. En 1789, il fut nommé délégué du Tiers-État à l'Assemblée générale du bailliage d'Amont qui recouvrait le nord de la Franche-Comté.

Alexis Bassenne et son épouse Jeanne-Claude Mougey ont eu neuf enfants. Parmi eux, Claude-Étienne Bassenne (1779-1857), époux de Josephte Cordelier (1780-1856) est le père de Louis-Alexis Bassenne, le grand-père de Paul.

L'acte de naissance de Louis-Alexis Bassenne : cliquez ici.

 

Comme ses aïeux, Louis-Alexis a laissé le souvenir d'un homme de responsabilités animé par l'esprit d'entreprise. Maire de Chaux-lès-Clerval au milieu du XIXe siècle, il a élargi ses activités au-delà de l'agriculture. Vers 1870, il obtint une concession de prise d'eau au barrage de l'écluse n°33 du Doubs nouvellement canalisé. Son intention était de créer en aval de Clerval une scierie mue par la force hydraulique.

 Jean Garneret écrit : "...C'était le père Bassenne qui avait fait creuser la conduite pour la scierie, à deux hommes ils l'ont creusée. Le père Bassenne a posé cette première turbine qui faisait marcher la scierie, puis une espèce de petit moulin." (dans "Vie et mort du paysan", L'Harmattan 2000) 

        Alexis Bassenne (1812-1876)

  

 

La scierie a fonctionné sous la raison sociale " Scierie Bassenne Frères", tenue par deux fils d'Alexis, Henri et Augustin, qui faisaient commerce de bois comme l'indique cette entête :

 

Voici la scierie telle qu'elle était représentée sur une carte de correspondance :

Vers 1900, la scierie a été achetée par deux associés, Villeminot et Garneret. Ils l'ont transformée en moulin et usine électrique qui assura l'éclairage public de la ville de Clerval dès le début du siècle. 

Le site de la scierie en 2010 : cliquez ici.

 

Le père de Paul, Pierre Constant Bassenne, fils de Louis-Alexis, a laissé également le souvenir d'un homme industrieux.

 

 

 

Constant Bassenne (1852 -1912)

 

 

 

 

L'acte de naissance de Pierre-Constant Bassenne : cliquez ici.

Son épouse, Marie Bergerot, était issue de familles d'agriculteurs établis de longue date à Tournans, Trouvans et Montussaint, villages du Doubs aux confins de la Haute-Saône.  

Marie était la fille de Claude Bergerot et Adèle Pergaud qui exploitaient un train de culture assez vaste pour occuper toute la famille.

 

 

La ferme des Bergerot à Tournans au début du XXème siècle.

 

 

 

Mise à disposition de la photo : G.Karsenty.

Selon ses propres dires, Marie, benjamine de 6 frères et sœurs, a connu une triste jeunesse. Orpheline de mère à 7 ans, elle fut envoyée en pension à Montmartin. A 18 ans, elle perdit son père, et à 20 ans, sa famille la maria avec Constant Bassenne, de 11 ans son aîné.

Le couple, installé à Chaux-lès-Clerval, eut 8 enfants dont 5 atteignirent l'âge adulte. En 1921, Marie, veuve depuis 1912, a été honorée de la médaille de bronze de la famille française.

 

 

 

  Marie Bergerot (1863-1957)

 Marie Bergerot a atteint l'âge de 94 ans. Pour ses nombreux petits-enfants, c'était la "grand-mère de Chaux" à qui ils rendaient visite le dimanche après-midi.

 

 

Tout comme son père, Constant Bassenne était une personnalité connue et respectée. Maire de Chaux-lès-Clerval de 1878 à 1892, il était également suppléant du juge de paix de Clerval en 1902. 

A côté de son exploitation agricole, il développa plusieurs activités. Son esprit d'entreprise n'épargnait pas les émotions à sa famille. En 1895, parti pour le midi pour acheter du vin, il resta absent un mois sans donner de ses nouvelles. En fait, il était allé en Afrique du Nord d'où il ramena un plein bateau de moutons et de chevaux arabes.      

Il prospéra également dans le commerce du vin qu'il importait d'Algérie avec son bateau baptisé "Le Petit Pierre". Associé à Armand Garneret, il exploitait à Clerval un entrepôt vinicole. 

L'entrepôt vinicole dont Constant Bassenne était co-propriétaire au début du XXème siècle. Une voie de chemin de fer aboutissait devant les bâtiments situés en contrebas. Une conduite souterraine permettait de vider les wagons-citernes dans les tonneaux de la cave. (Carte postale et renseignements aimablement fournis par M. Gérard Blanc de Clerval.)

Au tournant du siècle, la société Bassenne-Garneret élargit son activité aux Travaux Publics. En 1910, elle obtint par adjudication un marché d'entretien et de cylindrage de routes nationales dans le département de la Loire.  

 

 Le début des transports routiers.

Constant Bassenne fut également un pionnier dans le domaine du transport routier, une activité que ses descendants directs perpétueront un siècle après lui.

A partir du 1er janvier 1912, un service de transports automobiles fonctionna sur 21 km entre L'Isle-sur-le-Doubs et Sancey-le-Grand en remplacement des diligences. La ligne avait été concédée à la Société anonyme des cycles et automobiles Peugeot, mais c'est Constant Bassenne qui en était le directeur gérant et le propriétaire des véhicules : une voiture pour passagers de 10 places et 250 Kg de bagages, et deux camions de 2 tonnes de charge utile. Ces véhicules, circulant avec régularité à une vitesse moyenne de 15 km/h, participaient au désenclavement des villages isolés. Leur conduite était assurée par Paul Bassenne et Louis Busson, fils et gendre de Constant. Une construction en pierres fut érigée près de la chapelle au-dessus de Sancey-le-Grand pour abriter les voitures.

Devant ce succès, Constant Bassenne déposa en juillet et en août 1912 auprès des autorités départementales une demande d'exploitation de deux lignes supplémentaires. L'une de L'Isle-sur-le-Doubs à Villersexel en prolongation de la ligne existante, l'autre qui aurait relié Besançon (depuis la gare de la Viotte) au village de Marnay en Haute-Saône.

Malheureusement, Constant Bassenne mourut subitement le 13 novembre 1912. Le 6 janvier 1913, sa veuve, Marie Bergerot, informa le Conseil Général du Doubs qu'il ne lui était pas possible de s'occuper des services nouveaux projetés par son mari. En revanche, elle obtint la rétrocession de la ligne initiale de L'Isle-sur-le-Doubs à Sancey-le-Grand. Celle-ci continua d'être exploitée par la famille jusqu'au 2 août 1914. A cette date, en raison de la guerre, les voitures furent réquisitionnées et le transport automobile suspendu pendant deux ans. En 1916, le service fut rétabli, mais comme Mme Veuve Bassenne s'était désistée, c'est Léon Virot, un transporteur de L'Isle-sur-le-Doubs qui reprit la concession.

 

 

Un des oncles de Paul, frère de Pierre-Constant, était le général de brigade Louis Bassenne. (1858 - 1938),

 

Voir la biographie du général Bassenne en cliquant ici. 

 

Paul Bassenne a passé son enfance et sa jeunesse à Chaux-lès-Clerval. Après sa sortie de l'école, il travailla dans l'exploitation agricole familiale. Il suivit aussi une formation d'ajusteur et obtint, rareté à l'époque, le permis de conduire des automobiles. Il put ainsi participer aux débuts des transports routiers initiés par son père. 

Le 10 octobre 1913, il est appelé au service militaire qui se prolongea par les quatre années de la Première Guerre mondiale. Paul servit dans l'artillerie, successivement aux 59e, 12e, 62e, 259e et 7e Régiment d'Artillerie de Campagne. Avec ces unités, en tant que 1er Canonnier, il connut les plus meurtriers théâtres d'opération : Vosges, Aisne, Somme, Verdun... Il n'a été démobilisé que le 28 juillet 1919, après 5 ans et 9 mois sous les drapeaux.

 

 

 

 

Paul pendant la Première guerre mondiale.  (Photo prise à Gérardmer entre le 01/04/1917 et le 04/01/1919)

 

 

 

Mise à disposition de la photo : G.Karsenty.

La paix revenue, Paul retrouva son travail de chauffeur de car sur la ligne L'Isle-sur-le-Doubs-Sancey-le-Grand. En 1920, il est élu maire de la commune de Chaux-lès-Clerval, mais démissionna de ce poste en 1921.

 

 

 

 

Paul et sa sœur Cécile au volant de la quadrilette Peugeot vers 1925.

Aline Bouhélier.

 

Les ancêtres lointains de Cernay-l'Église.

Les Bouhélier sont une famille illustre du Haut-Doubs dont le berceau est le village de Cernay-l'Église, à trois kilomètres de  Maîche. Leur nom apparaît depuis le XVe siècle dans maints événements qui ont marqué l'histoire de la Franche-Comté et la rivalité séculaire entre la France et l'Empire des Habsbourg.

   

 

 

 

 

 

 Le plateau de Maîche, terre d'origine des Bouhélier.

 

 

 

 

 

 

Origine de la carte : Google Maps

 

En 1419, pendant la Guerre de Cent-ans, Richard Bouhélier de Cernay-l'Église, est aux côtés du duc de Bourgogne Jean-sans-Peur lorsque celui-ci est assassiné sur le pont de Montereau par les Armagnacs. Sept ans plus tard, ce même Richard Bouhélier accompagne le seigneur de Maîche dans une croisade contre les musulmans à Chypre où il périt au combat. En récompense de son sacrifice, le seigneur accorde à la famille Bouhélier ses premiers privilèges. 

En 1474, les chevaliers Richard et Huguenin Bouhélier sont parmi les vassaux appelés par le seigneur de Maîche pour défendre la place contre l'invasion des troupes de l'évêque de Bâle, allié du roi de France, Louis XI, qui convoite le Comté de Bourgogne. 

Vers 1500, les Bouhélier ont vu leurs domaines s'arrondir et leurs franchises étendues. La Franche-Comté étant passée sous la domination des Habsbourg en 1493, ils se mettent au service de l'empereur Charles-Quint. Leur fait d'armes le plus fameux est la participation, du moins selon la tradition locale, des deux frères Jean-Ferdinand et Alexandre Bouhélier à la capture du roi de France, François Ier, lors de la bataille de Pavie en 1525. En récompense, Charles-Quint accorde aux deux frères l'anoblissement qui est étendu à leurs cousins de Cernay-l'Église.

 

"Tout est perdu, fors l'honneur !" 

aurait dit François Ier après sa défaite de Pavie.

Parmi les soldats de Charles-Quint qui s'emparent du roi de France, les frères Bouhélier ?

 


Gravure de Dutheil d'après G. Durand. 1868. RV-377843
(© Collection Roger-Viollet)

Les Bouhélier détiennent désormais les prérogatives de la noblesse faites de pouvoirs et d'honneurs. Ils peuvent posséder des biens seigneuriaux et exercer la haute justice, ont le droit de pêche et de chasse et même celui de battre monnaie. Ils peuvent porter une arquebuse et toutes autres armes. Ils ont leur sépulture dans l'église de Cernay et peuvent arborer des armoiries.  

 

 

 Le blason des Bouhélier :  "De gueules à trois fasces d'or."

 

On trouve également l'expression :

"...timbrées d'un casque d'anobli qui est d'acier poli, de profil, sans grille et visière presque basse."

qui pourrait correspondre à ce décor de plaque de cheminée créée pour Pierre Ignace Bouhélier en 1712.

(Photo prise par B. Bertolino aux "Louisots" à Fournet-Blancheroche.)

 

Cependant, nombre de descendants Bouhélier ne peuvent faire valoir leur noblesse, faute d'être assez riches pour acquérir des fiefs. La plupart continuent de mener une vie roturière, profitant seulement de l'exemption des droits féodaux jusqu'en 1789.

Parfois, à l'occasion d'événements dramatiques, quelques représentants de la famille se montrent dignes de la réputation de leurs aïeux. Ainsi, toujours fidèle aux Habsbourg d'Espagne, Etienne Bouhélier participe en 1595 à la bataille de Fontaine-Française lorsque Henri IV veut s'emparer de la Franche-Comté. 

Quelques décennies plus tard, la Guerre de Trente-Ans éclate en Europe. La Franche-Comté, où elle est appelée "Guerre de Dix-Ans", est durement touchée. Les armées françaises, renforcées de troupes étrangères, envahissent une nouvelle fois la province. En 1639, les mercenaires suédois dévastent la vallée du Doubs. Pour défendre le village de Fournet-Blancheroche, Claudy Bouhélier (né vers 1604 - mort en 1666) rassemble une troupe de paysans, les harangue en patois et mène avec impétuosité la charge contre les Suédois qui sont défaits.

 

La harangue de Claudy Bouhélier (traduction)

"Mes amis, le bon Dieu a voulu, pour nous éprouver, peut-être aussi pour nous punir de nos péchés, nous livrer entre les mains de ses ennemis et des nôtres. S'il veut éprouver notre foi et connaître notre fidélité, combattons vaillamment afin de mériter d'être appelés ses soldats. S'il veut nous punir de nos péchés, montrons-nous pleins de bravoure, afin qu'ils soient effacés. Quoi qu'il en soit, montrons à l'ennemi qu'il a affaire à des paysans, à des Francs-Montagnards, à des catholiques; montrons lui que jamais nous ne lui permettrons d'implanter ici son infâme religion... Mais je vois que vous êtes impatients de vous mesurer avec l'ennemi. Je ne vous dirai donc pas davantage. Seulement souvenez-vous dans le combat, s'il vous arrive de plier, que vous défendez votre religion, vos biens, vos femmes, vos enfants, vos pères, vos mères, et tout ce que vous avez de plus cher. Mes amis, en avant !" 

 

En 1678, La Franche-Comté est définitivement rattachée à la France, mettant fin au rôle militaire des Bouhélier, probablement restés de cœur attachés aux Habsbourg d'Autriche et d'Espagne. Ne disait-on pas, encore au XVIIIe siècle, que dans le Haut-Doubs "les vieillards se faisaient enterrer la face contre terre en haine de la France" ?

Pendant les siècles suivants, la famille Bouhélier essaime en nombreux rameaux. Tandis que certains préservent leur noblesse et exercent des charges élevées dans l'administration, la justice et le clergé, un grand nombre se fondent dans l'anonymat de la paysannerie.

 

 

 

Au cours des siècles, à Cernay-l'Église, les Bouhélier maintiennent leur prééminence symbolisée par leur mainmise sur l'église du village. En offrant retable, statues, cloches et tableaux, la famille contribue à l'éclat du sanctuaire où elle occupe seize tombes.     

Cependant, à la veille de la Révolution, sa prépondérance est contestée. En 1778, sous prétexte de refaire le sol trop raboteux de l'église, les tombes des Bouhélier sont enlevées et remplacées par des pavés de pierre.

La famille Bouhélier porte plainte auprès du Parlement de Besançon qui condamne cinq habitants de Cernay à une amende et à payer la mise en place dans la nef d'une dalle qui porte gravé le texte du jugement.

  

 

 

Ci-contre, photo de la dalle où est gravé l'extrait des registres du Parlement de Besançon.

Le texte citait nommément les cinq habitants de Cernay condamnés. Par la suite, pour faire effacer cette mise au pilori, les inscriptions ont été en partie martelées.  

 

 

 

    Le chœur de l'église de Cernay aujourd'hui.

Le retable du maître-autel a été offert par les Bouhélier. Le tableau central représentant saint Antoine a été financé par Jacques Bouhélier en 1712. Le banc de communion a été forgé par Jean Romain Bouhélier en 1821.

On aperçoit le dallage, réalisé en 1778, qui a chassé les tombes des Bouhélier hors du sanctuaire.  

 

 
Sources du chapitre : "Les ancêtres lointains" :  

- "Au clos du Doubs 2005 et 2006",  publication du  GHETE  (Groupement d'échanges et d'études Hommes et Terroirs du Clos du Doubs) articles de M. Claude Bernard.

- Lettres sur mon pays ». (1892) d'Ulysse Robert.

- Remerciements à M. Michel Bouhélier et Mme Bernadette Bertolino pour les précieux documents fournis.

- nombreuses données sur le site de M. Christian Monneret : "Histoire et généalogie en Franche-Comté." 

 

Les ancêtres proches de Valonne.

Pendant la Révolution Française, vit à Valonne un descendant direct de Claudy, le héros de la guerre contre les Suédois. C'est Antoine François Bouhélier, originaire de Muriaux en Suisse, veuf de Anne Antoine Frénier, née à Trévillers. Un de leur fils, Jean-Joseph Bouhélier défraie alors la chronique par son fort engagement dans le parti des sans-culottes. 

En 1795, à Valonne, un autre fils, Jean-Baptiste Bouhélier, cultivateur, épouse Jeanne Claude Perrey. De ce couple est issu François-Xavier Bouhélier, époux de Marie Eléonore Bonvalot, le grand-père de Victor Joseph Alfred Bouhélier, le père d'Aline.

 

 

Aline Bouhélier, la mère de mon épouse, naît en 1898 à Valonne, dans le foyer d'Alfred Bouhélier et Augustine Ponçot qui ont cinq filles et un garçon. Ci-contre, Aline (cercle jaune) avec ses parents (flèches jaunes) et sa sœur Anne, (cercle rouge) qui, par son mariage avec le frère du mari d'Aline, deviendra aussi sa belle-sœur et partagera sa vie.

 Flèche rouge : la "Tintie" (voir ci-dessous)

 

Une aïeule pittoresque : La Tintie. 

Thérésia Ponçot, dite "La Tintie", tante célibataire d'Aline et Anne, a passé sa vie au foyer de sa sœur Augustine. Elle a laissé à ses petits-neveux le souvenir d'un personnage haut en couleurs dont les sentences, mêlant le patois au français, se répètent encore dans la famille. Féministe avant l'heure et farouche célibataire, elle aimait répéter :

 "Tous les hommes sont des foutipoux !" (des cochons) 

Lorsque sa nièce Aline lui annonça son mariage, la Tintie la "félicita" avec ces mots : " Il aimeront mieux t'enterra que de te maria !" (J'aimerais mieux t'enterrer que de te marier.)

Après la mort des époux Alfred et Augustine Ponçot en 1931, elle resta pendant 20 ans la maîtresse de maison.  Elle réussit à empêcher son neveu Louis d'amener une épouse au foyer car, disait-elle : "Je ne veux pas lâcher la queue du pochon." (de la louche)

Octogénaire, elle était encore fière de se vanter auprès des petites amies de ses petits-neveux : "Je suis toujours virdge !" (vierge) 

 

 

Thérésia Ponçot repose dans l'ancien cimetière, à l'ombre de l'église de Valonne.

 

 

La famille Bouhélier vers 1925.

 

Aline (cercle jaune) et Anne (cercle rouge) avec leurs parents, frère et sœurs. 

 De gauche à droite :

Debout : Anne, Adèle, Louis, Aline, Thérésia.
Assis : Augustine, Marie, Alfred.

 

 

 

Paul Bassenne et Aline Bouhélier :  la rencontre.

Bien longtemps avant leur mariage, Aline et Paul se sont rencontrés lors de péripéties restées dans la mémoire familiale. Dans les années 1912/1913, Aline, pensionnaire à Besançon, empruntait le car conduit par Paul entre Valonne et L'Isle sur le Doubs. Ne possédant pas de valise, la jeune fille transportait ses affaires dans un carton que le chauffeur déposait sur la galerie du véhicule. Un jour, il avait tellement plu que le carton ramolli par l'eau s'est ouvert et son contenu s'est éparpillé sur la route. Paul a arrêté le car, en est descendu et a lui-même ramassé les pièces de linge tombées sur la chaussée. A la fois confuse et charmée, l'adolescente fut séduite par le geste galant de ce jeune homme de six ans son aîné. Peu timide, il lui est arrivé par provocation de négliger de payer son ticket, obligeant le chauffeur à la relancer pour récupérer son dû.  

En 1913, Paul partit pour l'armée pour n'en revenir qu'à l'issue de la première guerre mondiale. Pendant ce temps, Aline poursuivait ses études à Besançon jusqu'au Brevet Élémentaire qui lui permit de trouver un emploi de comptable au moulin Villeminot au bord du Doubs, en aval de Clerval, sur le site même de l'ancienne scierie Bassenne.

Près de dix ans après leur première rencontre, Aline et Paul se retrouvèrent dans l'autocar entre Clerval et Valonne et entamèrent une relation encouragée par la mère de Paul qui lui avait confié : "J'aimerais bien pour toi la petite comptable du moulin."

 

Chaux-lès-Clerval, le village natal de Paul, domine les bâtiments qui abritaient le moulin Villeminot. Selon la tradition familiale, c'est sur le chemin de terre appelé "chemin des ânes", reliant le village aux bords du Doubs, que se retrouvaient  les deux amoureux. 

Le site du moulin en 2010 : cliquez ici.

 

 

 

 

Aline et Paul peu avant leur mariage.

(Photo de P. Bassenne fournie par M. Gérard Blanc de Clerval)

Les deux jeunes gens se marient en 1926. Ils effectuent leur voyage de noces à bord de la fameuse quadrilette Peugeot. Ils parcourent notamment la Route Napoléon en compagnie du général Bassenne, oncle de Paul qui doit parfois descendre de voiture pour la pousser dans les côtes du Galibier !

 

 

 

 

Après leur mariage, ils exploitent d'abord un café-restaurant-tabac à Sancey-le-Grand, puis un moulin à Voitre, à environ 5 Km de Sancey. Leurs trois premiers enfants naissent et grandissent à Sancey-le-Grand. Les voici avec leur mère devant la maison familiale en 1933. Debout sur l'escalier, en-haut : Claude, en bas : Constant, et dans les bras de sa mère : Jeannette. 

 

 

En 1934, ils achètent la maison de Clerval à côté de l'église où ils s'installent. Paul tient avec son frère Georges, qui a épousé Anne, la sœur d'Aline, un commerce de céréales à l'enseigne : "Grains et Issues". Aline de son côté ouvre un magasin de literie et trousseaux dans une aile de la maison familiale.

 

Document : En 1934, les fratries Bassenne et Bouhélier réunies sur une photo

  en cliquant ici.

 

Par la suite, Paul et Georges Bassenne se lancent dans les transports en achetant un premier camion de fabrication américaine avec des bandages pleins et une transmission à chaîne, remplacé en 1936 par un camion Bernard carrossé. Au lieu-dit "Le Millery" (à l'emplacement actuel des Matériaux Trimaille), ils créent un garage et un magasin de fournitures mécaniques. Les deux frères effectuent eux-mêmes les transformations et réparations de leurs véhicules. A Clerval et environs, Georges a la flatteuse réputation d'être capable de dépanner n'importe quelle machine ou appareil de l'époque. 

 

En-tête de papier à lettre du garage des frères Bassenne.

 

 

 

 

Paul Bassenne dans son atelier, en compagnie d'un ouvrier.

Les transports se spécialisent dans l'acheminement des fromages vers Paris. Le camion fait  d'abord la tournée de ramassage des lourdes meules de comté et d'emmenthal en Haute-Saône et dans le Doubs, puis c'est le long voyage à destination des Halles. Un seul trajet dure treize heures, le camion ne dépassant pas les 50 Km/h ! Pour le retour, Paul et Georges se muent en déménageurs, notamment pour les ménages de fonctionnaires qui ayant fait leur temps en région parisienne reviennent vers l'Est de la France.

Tous ces travaux comportent une manutention éprouvante : les meules de fromage pèsent jusqu'à 80 Kg, et les meubles déménagés sont parfois à descendre du huitième étage sans ascenseur !     

 

 

 

Le camion isotherme de marque Bernard des Transports Bassenne.

 

 

 

 

Le camion à Paris, prêt à être déchargé, sous le regard de Georges Bassenne (deuxième à partir de la droite, cigarette et lunettes).

 

 

Survient la Seconde Guerre mondiale. A la déclaration de la guerre, le camion, et Georges en tant que chauffeur, sont réquisitionnés par l'armée française. En 1940, devant l'avancée allemande, à bord d'un camion acheté d'occasion, Paul et Aline Bassenne et leurs enfants quittent Clerval. Ils se réfugient à Bort-les-Orgues (Corrèze) puis à Mont-Saint-Vincent (Saône et Loire). 

 

 

Dans ce courrier à sa belle-soeur Cécile Corneille, Aline Bassenne  donne les premières nouvelles sur le sort de sa famille après l'armistice. 

 

Carte aimablement offerte par M. Gérard Blanc de Clerval.

Lorsque Georges rejoint les réfugiés à Bort-les-Orgues, les deux frères travaillent temporairement dans une carrière avec le camion racheté à l'armée.   

Ils reviennent à Clerval en 1941 où Paul est employé par les Ponts et Chaussées. Le travail est exténuant lorsqu'il doit charger à la pelle un camion de six mètres cubes de sable !

Paul et Aline Bassenne avec leurs cinq enfants en 1941. De gauche à droite, au premier rang : Jeannette, Paul et Louis, Aline et Marie-Paule, Constant. Au second rang de gauche à droite : Georges, Claude, Anne.  

 

La petite dernière, Françoise, naît en 1943 :

 

 

Vers l'âge de 2  ans.

 

 

 

 

i

Vers 4 ans, déjà au volant en digne fille de son père ! 

A l'âge de 9 ans.

 

Les transports prospèrent dans la période de l'après-guerre, mais Paul Bassenne meurt prématurément en 1953, à l'âge de 61 ans. L'entreprise est reprise par son fils Constant, toujours épaulé par Georges. Aline tient son magasin jusqu'au début des années 60 où elle va s'installer à Besançon. Elle décède en 1981.

 

Aujourd'hui, Paul et Aline Bassenne ont plus de 35 descendants vivants. Puisse cette page les convier à honorer leur mémoire !

 

 
 Terminer le voyage au pays des ancêtres franc-comtois :

  Les anciennes maisons de famille.

 Autres étapes du voyage au pays des ancêtres du Doubs :  

  Localisation.

   Valonne et Chaux-lès-Clerval.

  Clerval.